Lettre ouverte aux organisateurs des 45e Journées nationales de l’APBG – Association des Professeurs de Biologie et de Géologie
À xxxx, président de l’Association des Professeurs de Biologie et de Géologie
À xxxx, coordinateur des Journées nationales de l’APBG des 21-23 novembre 2025
18 septembre 2025
L’association Winslow Santé Publique (1) souhaite exprimer son étonnement face à l’absence de toute mention de la pandémie de COVID-19 dans le programme des Journées nationales de l’APBG des 21-23 novembre 2025, pourtant consacrées à l’actualité dans le domaine de la santé et aux avancées de la recherche médicale, d’ailleurs parrainées par l’INSERM et ouvertes par son Président-Directeur général Didier Samuel.
Depuis 2020, la recherche scientifique internationale a produit un corpus de connaissances exceptionnel sur le SARS-CoV-2 : en biologie fondamentale, mais aussi concernant les modes de transmission aéroportée (2), la durée de contagiosité, les conséquences sur la santé à court et long terme, la prévention efficace par ventilation, filtration et autres mesures individuelles adaptées. Il s’agit donc là à la fois d’un sujet important de la recherche biologique et biomédicale, mais aussi d’un enjeu majeur de santé publique, le COVID long (3) touchant plusieurs millions de personnes en France, dont un nombre significatif d’enfants (4). Cette pandémie marque et va marquer d’autant plus notre société que la nécessaire prévention des nouvelles contaminations est au point mort, tandis que l’innovation thérapeutique face au COVID long reste extrêmement limitée, les malades ne recevant actuellement aucun traitement spécifique adapté.
Ignorer cette réalité, c’est exposer une partie de la population à la souffrance et au risque pourtant évitable d’aggravation de leur état de santé. Il est difficilement compréhensible que le virus du COVID-19 et les atteintes multisystémiques qui peuvent être dramatiques dont il est la cause ne figurent pas parmi les thèmes retenus pour les interventions scientifiques des Journées nationales de l’APBG. Même en ignorant les atteintes aux populations et aux individus des cinq dernières années (et comment le pourrait-on ?), les plus de 480 000 références disponibles dans la base de données PubMed (5) ou le prix Nobel de physiologie ou médecine 2023 récompensant le développement de vaccins à ARNm (6) ne justifieraient-ils à eux seuls que les professeurs de Sciences de la vie et de la Terre soient informés par leur association des progrès en recherche fondamentale et appliquée sur ce nouveau pathogène ?
Cela nous semble indispensable pour qu’à leur tour les professeurs puissent enseigner dans leurs établissements les bases d’une éducation à la santé à jour : ils ont un rôle essentiel dans la vulgarisation et l’acclimatation dans la société des résultats de la recherche scientifique sur le COVID-19, rôle d’autant plus précieux que les médias ou le corps médical ne se sont pas à l’heure actuelle approprié de façon satisfaisante ces résultats. L’APBG a pour cela un rôle essentiel à jouer en accompagnant les enseignants dans l’acquisition de nouvelles connaissances, et en favorisant leur participation à une nouvelle culture de prévention rendue encore plus indispensable depuis les débuts de la pandémie de COVID-19.
« Une bonne santé, c’est ce à quoi nous aspirons tous ! » Qui ne serait pas d’accord avec cette phrase de la présentation des Journées nationales 2025 de l’APBG ? Pour qu’elle ne reste pas à l’état de simple proclamation ne débouchant sur aucune réalité concrète, nous vous proposons deux pistes :
- Il n’est pas trop tard pour éviter que les Journées nationales soient l’occasion de nombreuses nouvelles contaminations, en recommandant aux participants malades de ne pas s’y rendre, en incitant au port d’un masque adapté (7) de type FFP2 même en l’absence de symptômes, en proposant des masques de différents types (non chirurgicaux) aux participants, en vérifiant l’efficacité du renouvellement de l’air intérieur à l’aide de capteurs à CO2, etc.
- Dans les établissements scolaires, lieux d’entretien de la dynamique épidémique, professeurs de SVT et leurs collègues de physique-chimie pourraient être à la pointe de la construction d’une nouvelle culture sanitaire concernant la qualité de l’air intérieur (QAI), à la suite de celle dont fut l’objet la qualité de l’eau potable à partir de la fin du XIXe siècle. Filtrer et renouveler l’air des salles de classes ou des restaurants scolaires permet de limiter la concentration d’aérosols respiratoires infectieux expirés par des élèves ou des personnels contagieux (mais pas forcément symptomatiques), et donc leur inspiration par d’autres, qui risquent ainsi d’être à leur tour contaminés. Une nouvelle législation ambitieuse (8) impose depuis 2024 le diagnostic de la QAI dans les établissements scolaires à l’aide de la mesure du taux de CO2 comme indicateur du renouvellement de l’air, et la mise en œuvre de mesures adaptées pour respecter les seuils correspondant à un air jugé sain, c’est-à-dire permettant de limiter efficacement les risques de transmission aéroportée. La mise en œuvre de cette loi dans les établissements scolaires constituerait un levier concret pour protéger élèves, enseignants et familles, mais collectivités territoriales de rattachement, équipes de direction et même syndicats de personnels semblent aujourd’hui s’accorder pour l’ignorer. Les professeurs de sciences expérimentales sont idéalement placés pour transmettre ces enjeux, sensibiliser les communautés éducatives, voire même initier avec leurs élèves des projets de science participative : campagnes de mesure de la QAI, campagnes de prévention et d’éducation à la santé (voir par exemple les ressources de l’association Nous aérons). Ils pourraient ainsi devenir des acteurs clés de la mise en œuvre de la loi de 2024, et plus généralement de la prévention du COVID-19 dans les établissements scolaires, participant ainsi à protéger leur propre santé et celle des autres personnels, celle des élèves et de leur famille, et, partant, de la société dans son ensemble.
Nous invitons leurs organisateurs à faire de ces Journées nationales de l’APBG à venir un véritable vecteur de diffusion et de mise en pratique des connaissances scientifiques sur cette pandémie toujours en cours, en prenant au sérieux la place particulière de l’enseignement des Sciences de la vie et de la Terre entre diffusion des connaissances et promotion d’actions vertueuses pour la préservation de la santé des écosystèmes, de leur biocénose, et de la santé humaine. Il serait désespérant que « vivre avec le virus » se résume à « vivre dans le déni de la pandémie et des effets du virus sur la santé »… En tant que professionnels de la transmission des savoirs, et aussi en tant que travailleurs ayant comme tous les autres le droit à des conditions de travail ne mettant pas en danger leur santé, les enseignants ont à double titre un rôle à jouer dans l’adaptation de notre société face à un risque épidémique qui n’a disparu que des conversations. Nous espérons que l’APBG aidera les professeurs de Sciences de la vie et de la Terre à prendre leur part dans cette évolution nécessaire.
Association Winslow Santé Publique
Liste des ressources utilisées :
2- https://www.science.org/doi/10.1126/science.abd9149
3- https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(24)01136-X/fulltext
4- https://winslow.fr/les-jeunes-aussi-ont-le-covid/
5- https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/?term=covid
6- https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2024/02/msc240008/msc240008.html
7- https://whn.global/oui-nous-continuons-a-porter-des-masques/
8- https://letsair.org/documents/renouvellement_air_ecoles_code_environnement.pdf