
De nombreuses organisations à vocation culturelle, politique ou sportive organisent régulièrement des rassemblements publics dans des locaux fermés non aérés. Faute de conseils adaptés, ces rassemblements favorisent la transmission du virus du COVID et d’autres virus aéroportés (grippe, coqueluche, tuberculose…). Le but de ce document est de fournir aux équipes organisatrices les éléments d’information leur permettant de mettre en place les actions nécessaires de réduction des risques en limitant au maximum la transmission des virus entre les personnes présentes.
Un évènement qui revendique d’être pleinement inclusif doit prendre en compte l’épidémie de COVID toujours en cours pour permettre à tout le monde de participer. Il s’agit d’étendre aux virus aéroportés les pratiques habituelles dans un festival : sécurité des personnes, accessibilité pleine et entière de tous et toutes aux rencontres et aux échanges sociaux pour qu’ils soient les plus riches possibles, sans discrimination implicite.
1- L’épidémie de COVID n’est pas finie et tout le monde est fragile et vulnérable
Les mesures sanitaires qui permettraient d’enrayer l’épidémie de COVID (amélioration de la qualité de l’air dans les transports en commun et les établissements recevant du public, campagnes de sensibilisation régulières, distribution de masques FFP2 dans les lieux de soin…) ont été abandonnées ou jamais mises en oeuvre par le gouvernement français après la fin de l’état d’urgence sanitaire en 2022. Pourtant le virus du COVID circule toute l’année à des niveaux comparables voire plus élevés qu’en 2020/2021 et “reste une menace sanitaire mondiale causant bien trop de (ré)infections, d’hospitalisations, de décès et de COVID Long alors que les moyens pour empêcher cela existent” comme le rappelle régulièrement l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
D’après l’état des connaissances scientifiques à date, le virus du COVID est un danger important pour tout le monde (enfants et jeunes adultes en bonne santé inclus) de par le risque conséquent de séquelles et de problèmes de santé à long terme au fur et à mesure des réinfections. Certaines personnes encore plus à risque de mort directe lors de la phase aiguë de la maladie (personnes immunodéprimées ou souffrant d’un COVID Long par exemple) sont de fait totalement exclues de la grande majorité des évènements publics.
«Le COVID Long est une maladie chronique qui survient après une infection par le SRAS-CoV-2 et qui est présente pendant au moins 3 mois sous la forme d’un état pathologique continu, récurrent et rémittent, ou progressif, qui affecte un ou plusieurs systèmes organiques.» National Academies of Sciences, Engineering and Medicine.
Le COVID Long est chronique (le virus est persistant) et vasculaire. Il se manifeste ensuite de multiples façons. N’importe quel système organique peut être atteint, et les patient-es peuvent présenter des symptômes et maladies multiples. Ex de symptômes : dyspnée, épuisement, douleurs thoraciques, douleurs articulaires, arythmie, difficultés de concentration, dysfonctionnements neurologiques, etc…
Il n’existe aujourd’hui aucun traitement curatif ayant prouvé son efficacité sur le COVID Long à travers un protocole de recherche clairement établi. Les patients peuvent en revanche bénéficier de traitements pour mieux gérer leurs symptômes et d’éventuelles rechutes.
Ensemble, mettons en place des conditions d’accès satisfaisantes aux événements que nous organisons. N’attendons pas que les personnes handicapées et malades chroniques portent toute la charge mentale de l’accessibilité et du soin dans nos espaces festifs.
2- Le virus du COVID se transmet dans l’air partagé collectivement
Le virus du COVID est un virus aéroporté, c’est à dire qu’il se transmet par l’air. Dans une pièce fermée (comme une salle de réunion), les personnes présentes se partagent l’air lorsqu’elles respirent. Si une personne est infectée par le virus du COVID, elle va expirer des particules de virus qui se comportent comme de la fumée de cigarette : sans aération et sans filtration de l’air, ces particules invisibles et inodores restent comme suspendues dans l’air pendant plusieurs heures. Elles passent ensuite dans les poumons de toutes les personnes présentes dans la pièce, même celles qui sont à plusieurs mètres de la personne contagieuse. On peut ainsi s’infecter dans une pièce mal aérée plusieurs heures après le passage d’une personne contagieuse (dans des toilettes partagées par exemple). Et contrairement à ce que l’on pensait au début de l’épidémie, le virus du COVID ne se transmet pas par contact (en touchant une poignée de porte contaminée et en se frottant le visage par exemple). Le lavage des mains et l’utilisation de gel hydroalcoolique sont donc inefficaces face au virus du COVID.

Diffusion aéroportée du virus comme de la fumée de cigarette. Vidéo réalisée par https://johnsnowproject.org/
De plus, comme beaucoup de virus et bactéries (notamment les IST), le virus du COVID se transmet majoritairement de façon asymptomatique : dans environ 60% des contaminations, la personne transmet le virus sans s’en rendre compte, c’est à dire sans se sentir malade et sans présenter de symptômes visibles.
La transmission par l’air du virus du COVID explique que le risque de contamination est très élevé dans les lieux clos mal aérés et, dans une moindre mesure, en extérieur dans des foules denses.

Actuellement, on ne sait pas mesurer la quantité de virus du COVID présente dans l’air ambiant, intérieur ou extérieur. Mais on sait que lorsqu’une personne respire, elle rejette du CO2. Si elle est infectée, elle rejette également des particules de virus. Pour cette raison, la quantité de CO2 mesurée dans une pièce donne une information indirecte sur la densité de particules de virus présentes dans l’air, et donc sur la probabilité d’une transmission. En pratique, si une ou plusieurs personnes contagieuses sont présentes sans masques dans une pièce non aérée et non filtrée, alors la probabilité de contagion est très élevée.
Dans une pièce fermée non aérée où une personne contagieuse est présente, voici la probabilité que les autres personnes, qui respirent le même air qu’elle pendant 15 minutes, soient contaminées :

Seul le masque FFP2 porté par tout le monde permet d’éviter la transmission du virus du COVID
dans une pièce mal aérée.
Ainsi, pour éviter les contaminations entre humains, il faut :
- Aérer les locaux quand c’est possible
- Purifier l’air intérieur, encore plus lorsque l’aération n’est pas possible
- Protéger les personnes présentes en distribuant des masques respiratoires FFP2, encore plus lorsque l’aération et la purification ne sont pas possibles.
Lors d’événements rassemblant un grand nombre de personnes, une attention particulière doit être portée aux lieux de boisson/restauration qui sont des lieux de proximité physique importante qui favorisent les contaminations.

3- Les bases pour agir : information, prévention, antivalidisme
– Informer le public avant et pendant le festival
De la même manière que le Festival informe à l’avance sur l’accessibilité aux personnes handicapées, il informe à l’avance sur les mesures prises pour protéger les personnes du COVID. Ainsi, les visiteurs et visiteuses ont accès à une information fiable pour évaluer le risque et se protéger en conséquence. Cela est d’autant plus important qu’il n’y a plus aucun message de prévention du gouvernement et des institutions de santé publique pour maintenir la vigilance sur l’épidémie de COVID.
Cela a également une autre fonction, qui est de déculpabiliser les personnes qui voudraient porter un masque mais ne le font pas par peur du validisme et de l’exclusion sociale. En effet, le port du masque est devenu tabou depuis la fin de l’état d’urgence sanitaire, et les très rares personnes qui le portent encore doivent affronter quotidiennement le regard des autres, qui peut être interrogatif, voire moqueur ou même hostile.
Pendant le festival, l’information du public pourra être renforcée par la diffusion de flyers ou la pose d’affiches dédiées à la prévention contre le COVID, pour maintenir la vigilance des festivaliers et festivalières, et affirmer la volonté de l’équipe organisatrice de réduire les risques.
Dans les salles fermées, il est recommandé de mettre en place un affichage dynamique du taux de CO2 via un capteur et un afficheur. Cela permet d’informer les personnes présentes du niveau de risque encouru (voir chapitre suivant prévention).

Afficheur dynamique du taux de CO2 dans une salle de classe; la valeur indiquée ici (1236 ppm CO2/m3) est élevée et signifie que les élèves se transmettent activement le virus s’ils sont porteurs.
– Mettre en place des actions de prévention pendant le Festival
AÉRER. D’une manière générale, il faut favoriser l’organisation des évènements en extérieur. Pour les rencontres et débats qui se déroulent en intérieur, il faut aérer régulièrement les pièces dans la mesure du possible. Une aération efficace consiste en la création d’un courant d’air grâce, par exemple, à l’ouverture de deux fenêtres opposées. Pour éviter les courants d’air désagréables, l’utilisation de bloqueurs de fenêtres peut être très utile pour maintenir un renouvellement d’air suffisant sans qu’il soit trop fort. Les pièces borgnes (pièces sans autre ouverture que la porte) sont donc à éviter autant que possible. Coût : quasi nul.
DISTRIBUER DES MASQUES FF2 GRATUITS. Le fait que des masques FFP2 de bonne qualité soient mis à disposition gratuitement et distribués par les organisateurs et organisatrices du festival permet de déculpabiliser les personnes hésitantes et éviter un grand nombre de contaminations. Cette distribution “officielle” renforce le sentiment que le port du masque pendant le festival est normal et non honteux. Il est recommandé d’expliquer pourquoi des masques sont distribués et à quoi ils servent. Par exemple via un mail informatif avant le festival, une prise de parole au démarrage du festival ou via un stand de prévention à l’entrée du festival. Il est aussi recommandé que les organisateurs et organisatrices du festival montrent l’exemple en portant un masque. Coût estimé pour 1000 masques : 300 €.
AFFICHER LE TAUX DE CO2. Dans les locaux qui doivent rester fermés et clos (par exemple pour des raisons de bruit ou de froid), il est nécessaire d’installer des mesureurs et afficheurs de taux de CO2, pour informer les personnes présentes du risque qu’elles prennent. Cette information est cruciale pour que les personnes qui le souhaitent puissent se masquer dès que c’est nécessaire. Le seuil habituel est de 600 ppm CO2/m3 : au-dessus de cette valeur, le virus se transmet rapidement entre les personnes présentes. Coût : 200 € pour un capteur/afficheur.
PURIFIER L’AIR INTERIEUR. Pour diminuer la probabilité de contaminations, il est possible d’installer des purificateurs d’air. Ce sont des appareils qui, grâce à un ventilateur intérieur, filtrent en permanence l’air de la pièce pour piéger les virus en suspension (et beaucoup d’autres polluants). Leur dimension et leur nombre doit être calculé en fonction du volume de la pièce pour assurer un fort renouvellement d’air (6 volumes par heure sont recommandés). Ces équipements peuvent être installés de manière permanente ou temporaire. Mais ils ne peuvent, à eux seuls, garantir une protection totale, car ils n’empêchent pas des personnes physiquement proches de se transmettre le virus.
A noter qu’il existe aussi des appareils qui neutralisent les virus grâce à des rayons ultra-violets (UVC lointains). Cette solution est la meilleure pour les locaux professionnels.


– Lutter contre le validisme
On estime actuellement à environ 2 millions de personnes en France qui vivent avec un COVID Long (chiffre largement sous-estimé car non actualisé depuis 2022), et leur nombre croît sans cesse puisque les réinfections augmentent les chances de développer un COVID Long. Tout le monde est à risque, même les enfants et les jeunes adultes “en bonne santé”. Même si la mortalité lors de la phase aigüe de la maladie a fortement baissé grâce aux vaccins (qui diminuent également les risques de développer certaines manifestations du COVID Long), chaque réinfection est dangereuse. Le COVID Long remet en question la capacité des personnes touchées à vivre de façon autonome, à travailler et à militer. Le COVID Long peut également tuer à moyen-long terme.
Un festival qui revendique d’être pleinement inclusif doit prendre en compte l’épidémie de COVID toujours en cours pour permettre à tout le monde de participer. Il s’agit d’étendre aux virus aéroportés les pratiques habituelles dans un festival : sécurité des personnes, accessibilité pleine et entière de tous et toutes aux rencontres et aux échanges sociaux pour qu’ils soient les plus riches possibles, sans discrimination implicite.
4- Exemple de festival sans COVID
Le collectif féministe “Les Ourses à Plumes” a organisé un festival pour ses 10 ans d’existence à l’Académie du Climat à Paris en mars 2025.
https://lesoursesaplumes.info/2025/03/14/venez-feter-les-10-ans-des-ourses-a-plumes/

